L’agnosie est une perte de la capacité de reconnaître les objets que l’on voit (agnosie visuelle) ou les bruits que l’on entend (agnosie auditive), alors que les fonctions sensorielles (vision, audition, toucher, etc…) sont normales.
Les études cliniques montrent que les personnes souffrant de maladies neurodégénératives présentent des troubles gnosiques – c’est-à-dire l’impossibilité de reconnaître des objets, des formes, des visages. La reconnaissance des visages est particulièrement altérée dans les démences fronto-temporales et de type Alzheimer, ainsi que dans la maladie de Parkinson. Ces troubles gnosiques, et particulièrement la prosopagnosie, expliqueraient l’apparition de troubles comportementaux et psychologiques.
Agnosie et maladie d’Alzheimer
La maladie d’Alzheimer se caractérise principalement par une dégénérescence progressive de l’hippocampe et du cortex entorhinal, entraînant une altération de la mémoire épisodique et de l’apprentissage, rendant ainsi difficile l’apprentissage de nouveaux visages.
Une perte de la mémoire sémantique est par la suite observée au fur et à mesure que la maladie progresse: le patient a de plus en plus de mal à retenir les informations liées aux personnes à partir de leur visage. Il perçoit difficilement le proche comme une personne familière et finit par ne plus la reconnaître.
Les patients éprouvent des difficultés à interpréter des expressions faciales négatives exprimant la peur et la tristesse. Des troubles comportementaux de type délirant apparaissent au fur et à mesure que la maladie s’aggrave, se traduisant par la conviction que le proche a été remplacé par un sosie (syndrome de Capgras). Ces troubles viennent entraver la communication, engendrent des comportements inadaptés et affectent la vie relationnelle des patients.
Au stade sévère de la maladie, le patient ne se reconnaît plus dans un miroir. Face à son image, le patient présente différentes attitudes : hésitation, indifférence ou évitement.
Les études de neuroimagerie ont rapporté des lésions des neurones situés dans les régions limbiques (ex l’amygdale), du cortex temporal et préfrontal, sans doute à l’origine de ces troubles gnosiques.
Agnosie et démences fronto-temporales
Les démences fronto-temporales (DFT) constituent un groupe de maladies neurodégénératives caractérisées par des troubles du comportement et du langage, associés à une détérioration intellectuelle.
Les patients sont le plus souvent anosognosiques (anosognosie : trouble neuropsychologique se définissant par une méconnaissance par l’individu de sa maladie). Ils sont capables de reconnaître des visages familiers et d’en extraire les caractéristiques qui ne sont liées à des émotions (i.e. âge, sexe), mais ont plus de difficultés à identifier les émotions négatives du visage, tels que la peur, la colère et le dégoût. La reconnaissance des émotions positives peut être également affectée.
L’ensemble de ces déficits expliquerait l’apparition de certains troubles comportements et psychologiques (comportement en société inapproprié, empathie) et seraient reliés à une atteinte progressive de l’amygdale, du lobe frontal, puis du lobe temporal.
Lorsque le lobe temporal est touché, le patient présente des difficultés à identifier les personnages célèbres, ce qui s’apparente plus à une démence sémantique ou une aphasie progressive primaire, qui sont deux sous-types de DFT où prédominent les troubles du langage.
La démence sémantique est caractérisée par des troubles précoces du comportement et un déficit de la compréhension des mots, une modification du fonctionnement social et un manque d’empathie. Le patient perd la notion de concepts, en lien avec une dégénérescence du lobe temporal.
Le patient n’est plus capable de mettre un nom sur un visage célèbre ou familier. L’impossibilité de reconnaître des visages peut être de nature associative (le patient identifie la personne à partir de son nom et non de son visage) ou sémantique (le patient ne peut reconnaître la personne).
* L’agnosie associative se réfère à l’incapacité d’attribuer une signification à un stimulus correctement perçu.
Par ailleurs, les patients présentent des difficultés à identifier des expressions faciales évoquant la peur, la colère ou la tristesse. Ce déficit est corrélé à une atrophie du lobe temporal, de l’amygdale et du cortex frontal.
La maladie de Parkinson
Bien que les symptômes moteurs prédominent dans la maladie, l’existence de troubles cognitifs, psychologiques et comportementaux (anxiété,dépression, apathie) serait associée à une dégénérescence des régions cérébrales situées dans les ganglions de la base.
Une altération précoce du traitement de l’émotion (reconnaissance de l’expression faciale de dégoût et de peur) a été observée chez des parkinsoniens, alors que la capacité de reconnaître des expressions positives (expression de joie) est préservée. L’atteinte des ganglions de la base et de l’amygdale serait à l’origine de ce déficit du traitement de l’émotion.