Le syndrome d’Ekbom, également appelé parasitose délirante, est un trouble psychiatrique qui se traduit par la conviction d’être envahi d’organismes étrangers sur la peau, les muqueuses ou les orifices. Le préjudice porte alors sur l’intégralité du corps.
Les patients atteints du syndrome d’Ekbom consultent généralement des médecins de famille.
Une patiente de 66 ans a consulté le service d’urgence de notre hôpital pour une infestation d’insectes d’elle-même et de son appartement. Elle se plaignait de prurit chronique généralisé et de prurigo.
Elle avait déménagé dans un autre appartement au cours des semaines précédentes, mais l’infestation persistait. Elle a ensuite vécu dans un appartement sans animaux et ses voisins ne se sont pas plaints de la présence d’insectes.
La patient était divorcée, retraitée et vivait seul. Il n’y avait rien de notable dans ses antécédents médicaux. Elle n’a pris aucun médicament et il n’y avait aucun antécédent de voyage, d’allergies ou de problèmes d’hygiène. Elle a passé ses journées à nettoyer et passer l’aspirateur dans son appartement. Elle a indiqué qu’elle avait changé son matelas 3 fois au cours des 3 derniers mois et qu’elle avait été forcée d’acheter de nouveaux vêtements parce que les insectes les mangeaient. Elle croyait que son prurit pouvait être lié à la gale.
Les marques de grattage étaient des lésions bleu violacé, arrondies et brutes. Ils n’étaient pas compatibles avec une infestation par Pediculus humanus corporis ou Sarcoptes scabiei. Les résultats de l’examen clinique étaient par ailleurs normaux.
L’analyse sanguine n’a révélé aucune carence en fer, insuffisance rénale ou syndrome inflammatoire.
La patiente étant en bon état général, elle a été renvoyée chez elle sans aucun traitement ni aucune autre évaluation clinique. L’échantillon d’insectes qu’elle a amenés a été envoyé au service de parasitologie. Sur la base de caractéristiques microscopiques, l’analyse a identifié des araignées.
Peu de temps après, la patiente a signalé une aggravation de l’infestation. Elle se plaignait de l’insuffisance totale de tous les traitements mécaniques et chimiques qu’elle avait essayés.
Pendant 3 mois, elle a consulté plusieurs médecins. Aucune maladie infectieuse ni organique n’a été diagnostiquée. La patiente n’avait pas peur, mais était plutôt obsédée par la présence d’insectes dans son corps.
Son incapacité à prouver la réalité de la présence d’insectes la rendait légèrement paranoïaque, et elle est devenue anxieuse et confuse.
Compte tenu des lésions cutanées et du risque d’infection dû à l’utilisation de vinaigre sur les plaies, elle a finalement accepté de consulter son dermatologue pour de nouveaux soins.
Diagnostic de syndrome d’Ekbom
Un trouble psychiatrique a été suspecté lors de la première visite du patient à l’urgence (et également par le médecin généraliste).
Les urgentologues ont éliminé les causes organiques courantes de prurit et de prurigo : les causes externes, telles que la gale, et les causes internes, telles que l’insuffisance rénale et la carence en fer. Ensuite, un interrogatoire minutieux a été effectué pour vérifier les antécédents médicaux, les traitements, les voyages, les animaux de compagnie et l’exposition aux maladies contagieuses.
Un diagnostic de syndrome d’Ekbom a été établi. Presque toutes les caractéristiques typiques décrites dans le syndrome d’Ekbom étaient présentes chez ce patient : âge avancé, solitude, problèmes personnels, le signe «boîte d’allumettes» (c’est-à-dire apportant la preuve de l’infestation dans de petites boîtes), maladie cutanée antérieure dans sa famille. Le syndrome d’Ekbom est un diagnostic alternatif du prurit chronique et le prurigo.
Traitement
Pour traiter le syndrome d’Ekbom, un soutien psychothérapeutique est bien sûr nécessaire, mais le plus difficile est de convaincre le patient de l’absence de parasites et d’obtenir son accord pour consulter un psychiatre.
La cause de ce syndrome d’Ekbom n’est pas entièrement comprise: elle peut être due à des hallucinations ou à une fausse interprétation des perceptions de démangeaisons. Les médicaments antipsychotiques conduisent à une amélioration; le pimozide a été recommandé comme médicament de choix, mais des antipsychotiques atypiques, tels que la rispéridone, ont également été prescrits car ils présentent moins d’effets secondaires. La rémission complète n’est obtenue que dans la moitié des cas avec un traitement antipsychotique.
Un an après sa première visite, la patiente se sentait mieux car elle utilisait un revêtement de mobilier pour se protéger contre les acariens. Une consultation avec un psychiatre aurait été utile, mais elle n’a pas été organisée en raison du refus du patient.