Aphasie primaire progressive
Commentaires fermés sur Aphasie primaire progressiveL’aphasie primaire progressive est caractérisée par une détérioration du langage lentement progressive, avec des formes non fluentes, fluentes et mixtes. Elle peut être confondue avec la maladie d’Alzheimer.
L’aphasie primaire progressive inclut plusieurs affections neurodégénératives de l’hémisphère dominant du langage.
Elle débute généralement entre 45 et 70 ans par un trouble du langage isolé et se caractérise par un trouble du langage d’apparition lentement progressive, touchant la production et/ou la compréhension du langage. Ce trouble apparaît isolé pendant quelques années.
Il existe différentes formes d’aphasie primare progressive :
- l’aphasie fluente progressive, caractérisée par une diminution de la compréhension des mots qui prédomine. Le langage parlé est fluide, avec cependant parfois des difficultés à trouver des mots, et la grammaire est pratiquement conservée;
- l’aphasie logopénique progressive, caractérisée par une production verbale diminuée et des difficultés à trouver des mots, la grammaire reste conservée;
- L’aphasie non fluente progressive. Dans ce cas, c’est tout d’abord la production du langage qui est touchée. L’élocution est ralentie et la construction des phrases pleine de fautes.Il existe des paraphasies phonématiques (difficultés dans la séquence des phonèmes) . La compréhension du langage reste pratiquement intacte. Une aphasie non fluente progressive est parfois la première manifestation d’une dégénérescence corticobasale;
- l’aphasie progressive primaire.
L’aphasie progressive peut être confondue avec la maladie d’Alzheimer. La compréhension verbale est diminuée dans les aphasies fluentes progressives, entraînant un faible score au test de la mémoire verbale.
A l’inverse, un trouble du système sémantique lexical observée dans l’aphasie est souvent un symptôme dans la maladie d’Alzheimer.
Cependant, l’importance de la détérioration sémantique, l’absence de véritable amnésie et d’altérations des aires cérébrales pariétales permettent dans de nombreux cas de faire la distinction avec la maladie d’Alzheimer.
Un simple test cognitif tel que le mini-examen mental (MMSE) ou le test des cinq mots peut aider à faire cette distinction. Contrairement aux patients Alzheimer, les patients aphasiques ont par exemple plus de problème à nommer des objets mais ont plus de facilité à se souvenir de la liste des cinq mots ou à recopier des dessins (par exemple deux pentagones).
Épidémiologie
Entre 0,5 et 2,5% des patients souffrant d’une maladie neurodégénérative (par exemple une maladie d’Alzheimer) présente un aphasie progressive primaire. Son incidence est estimée à 1/100 000 et la survie moyenne est de 8 ans (minimum 3 ans et maximum 17 ans).
Les critères diagnostiques
La plupart des patients consultent leur médecin pour des difficultés à trouver des mots et des noms.
- Difficulté à début progressif et lentement évolutive à trouver les mots, nommer les objets, dans la syntaxe ou la compréhension des mots dans la conversation ou lors d’un test neuropsychologique du langage établi.
- Toutes les difficultés rencontrées dans la vie courante pendant les deux premières années suivant le début des symptômes peuvent être imputées au trouble du langage. La fonction du langage prémorbide est intacte (une dyslexie est possible au cours de l’évolution)
- Apathie, désinhibition, troubles de la mémoire récente, troubles de la vision tridimensionnelle, trouble de la reconnaissance visuelle et déficits sensitivomoteurs marquants sont absents pendant les deux premières années de la maladie, compte tenu de l’anamnèse, des activités courantes ou des résultats neuropsychologiques, ce qui fait que le patient ne remplit aucun critère diagnostique d’une autre pathologie démentielle.
- D’autres fonctions cognitives peuvent être touchées après les deux premières années, mais le langage reste la fonction la plus atteinte pendant toute l’évolution de la maladie et se détériore plus rapidement que les autres fonctions.
- Les autres causes d’aphasie telles qu’accident vasculaire cérébral ou tumeur sont exclues par l’imagerie.
Quel est le diagnostic différentiel de l’aphasie primaire progressive ?
Si le diagnostic d’aphasie progressive n’est pas posé, le médecin cherchera du côté des pathologies suivantes:
- Tumeurs cérébrales.
- Pathologies vasculaires (exemple infarctus).
- Maladie d’Alzheimer.
- Démences frontotemporales.
- Dégénérescence corticobasale.
- Paralysie supranucléaire progressive.
- Trouble du langage psychogène.
Le diagnostic différentiel le plus fréquent de l’aphasie progressive est la maladie d’Alzheimer.
L’importance d’une détérioration de la sémantique et l’absence d’altérations dans le cortex pariétal permettent cependant dans de nombreux cas de faire la distinction avec la maladie d’Alzheimer. Un test cognitif tel que le mini-examen de l’état mental peut aider à faire cette distinction.
Une aphasie non fluente progressive est parfois la première manifestation d’une dégénérescence corticobasale.
La paralysie supranucléaire progressive peut s’accompagner d’une aphasie non fluente progressive. Les symptômes classiques de la paralysie supranucléaire progressive sont des troubles parkinsoniens avec des chutes à répétition, un ralentissement psychomoteur, de l’apathie et des problèmes de planification.
Cas pratique d’aphasie primaire progressive
Anamnèse
En 2008, un professeur de musique à la retraite (76 ans) se présente
chez un médecin gériatre. Lors de l’entretien avec son médecin, son conjoint a
remarqué que :
– elle marquait un désintérêt pour les activités
qu’elle pratiquait auparavant (jouer au bridge, aller au musée);
– elle se négligeait;
– elle ne s’occupait plus de son compte bancaire, de
la maison (courses, vaisselle etc.);
– ses conversations étaient limitées, mais continue à
lire quotidiennement.
Bilan neuropsychologique
En 2009, son état ne s’étant pas amélioré, elle effectue un bilan
neuropsychologique dont voici les résultats :
– Score au test cognitif du mini-examen mental (MMSE): 22/30
– Test de l’horloge : 3/7
– Test
des 5 mots : 9/10 (rappel immédiat : 5/5; rappel différé : 4/5)
– Évaluation rapide des fonctions cognitives (ERFC)
Item 1. Orientation temporo-spatiale : 8/8
Item 2. Attention et mémoire : 8/10
Item 3. Calcul mental : 0/2
Item 4. Raisonnement et jugement : 4/5
Item 5. Compréhension : 5/5
Item 6. Dénomination : 3*/4
Item 7. Répétition : 2/2
Item 8. Ordre écrit : 1/1
Item 9. Fluidité verbale: 1*/4
Item 10. Praxies: 6/6
Item 11. Décodage visuel: 1/1
Item 12. Écriture : 0/2
Son score est de 39/50.
Diagnostic
Elle souffre :
– d’un manque de fluence dans son discours. Au cours
d’un test de fluence sémantique, le patient ne donne que deux mots appartenant
à la catégorie ‘fruit’ en 2 minutes.
– d’agraphie : trouble de l’écriture indépendamment
de n’importe quels troubles moteurs. désordre neurologique de la motricité
entravant les gestes élémentaires de l’écriture.
– d’alexie (incapacité d’un individu à lire et
comprendre un texte).
– de paralexie sémantique : le sujet remplace des
mots d’un texte par d’autres; le langage devient inintelligible.
Les autres capacités sont intactes : mémoire épisodique, capacités de conceptualisation, à effectuer des gestes, praxies, capacités visuo-spatiales, fonctions exécutives, orientation temporo-spatiale.
Diagnostic : la patient souffre probablement d’une aphasie primaire progressive.