Tag Archive: chutes personnes âgées

  1. Chutes des personnes âgées : conséquences et prévention

    Commentaires fermés sur Chutes des personnes âgées : conséquences et prévention

    Les chutes des personnes âgées sont fréquentes (environ un tiers chutent à domicile au moins une fois par an. Elles peuvent avoir de graves conséquences pour elles et leur entourage.

    Les chutes sont l’une des principales causes de blessures chez les aînés. Nous profitons du mois de la prévention des chutes, pour vous rappeler qu’il est possible d’agir sur certains facteurs qui vous mettent à risque.

    Épidémiologie des chutes des personnes âgées

    Les chutes des personnes âgées et des athlètes sont plus fréquentes que chez l’ensemble des autres adultes. Cependant, les personnes âgées représentent une catégorie très vulnérable du fait d’une forte prévalence de maladies (par exemple l’ostéoporose) et d’altérations naturelles liées à l’âge (par exemple ralentissement des réflexes de protection).

    Les chutes représentent la première cause de mortalité chez la femme et la quatrième chez l’homme âgé de 65 et plus. Un tiers des sujets âgés de 65 ans et plus font au moins une chute par an. Elles sont trois plus fréquentes dans une institution médicale qu’au domicile : la moitié des résidents sont affectés contre un tiers de ceux vivant à domicile.

    Les chutes représentent un coût médical annuel de plus d’un milliard d’euros (plus de 10 milliards aux États-Unis). Au Canada, les chutes chez les personnes âgées coûteraient chaque année 2,8 milliards de dollars au système de santé, dont un milliard en soins directs (Source santé Canada). Elles présentent également un coût indirect puisque nombre d’entre eux voient leur qualité de vie diminuée : perte d’autonomie et de l’estime de soi, isolement, dépression, peur phobique de chuter de nouveau.

    Les chutes sont la première cause de fracture de la hanche, particulièrement chez les femmes ayant une faible densité minérale osseuse. Le risque de mortalité semble plus élevé chez les hommes que chez les femmes (30% versus 10% un an après une chute). La moitié des aînés victimes d’une fracture de la hanche ont des difficultés à effectuer des tâches de la vie quotidienne.
    Elles n’épargnent pas non plus les personnes âgées s’estimant en bonne santé physique puisque 20% d’entre eux chutent au cours d’une année.

    Le risque de chute augmente avec l’âge et en présence de troubles/maladies des fonctions supérieures (fonctions motrices, cognitives, cardiaques, etc.).
    Le risque de récidive est élevé puisque environ la moitié des aînés ayant chuté récidiveront au moins une fois dans l’année.

    La communauté médicale doit évaluer les causes d’une chute (qui est souvent le reflet d’une ou de plusieurs pathologies sous-jacentes), en évaluer les conséquences, et entreprendre des mesures préventives pour éviter les récidives.

    Causes des chutes des personnes âgées

    La recherche des causes est importante pour éviter les récidives. Elles ne sont pas aisées à déceler et plusieurs peuvent être associées au même patient.

    Voici énumérés les facteurs prédisposant aux chutes :

    1. Troubles et maladies neurologiques 
    Accident cérébrovasculaire
    – Tumeur cérébrale
    Maladie de Parkinson ou autres troubles moteurs
    – Hydrocéphalie à pression normale (augmentation du volume des ventricules cérébraux et espace sous-arachnoïdien).
    – Atteinte de la moelle épinière provoquée par une carence en vitamine B12
    – Hypovitaminose D (<12µg/L)
    – Neuropathies périphériques (diabète, abus d’alcool, carences nutritionnelles et en particulier en vitamine B12, certains médicaments tels que la vincristine)
    – Troubles cognitifs altérant le jugement, la perception visuo-spatiale, et l’orientation
    Dépression et anxiété (particulièrement chez la personne vivant seule et se sentant dévalorisée)
    Confusion
    – Troubles du sommeil

    2. Troubles et maladies musculosquelettiques 
    – Myopathies provoquées par un hypothyroϊdie, certains médicaments (par ex. corticoïdes, hypolipémiants, diurétiques), l’alcool)
    – Myorelaxants (benzodiazépines…)
    – Pseudopolyarthrite rhizomélique (maladie de Horton)
    – Chondrocalcinose (formation de calcium dans les articulations)
    – Polyarthrite rhumatoϊde d’origine inflammatoire entraînant une déformation de la cheville ou du pied
    – Myasthénie (troubles de la transmission entre le nerf et le muscle)
    – Sarcopénie (baisse de la masse musculaire et augmentation de la masse graisseuse)
    – Cyphose (courbure de la colonne vertébrale)
    – Arthrose cervicale (destruction progressive du cartilage des articulations)
    – Coxarthrose (usure chronique de la hanche)
    – Gonarthrose (usure chronique du cartilage de l’articulation du genou)

    3. Troubles et maladies cardiovasculaires 
    – Arythmie cardiaque (tachycardie ventriculaire, bradycardie; fibrillation auriculaire)
    – Troubles de la conduction (mauvaise propagation de l’influx nerveux dans le coeur)
    – Hypotension orthostatique (chute de la pression systolique)
    – Insuffisance cardiaque
    Hypertension artérielle
    – Syndrome du sinus carotidien
    – Sténose aortique (rétrécissement de la valve aortique)

    4. Troubles de la vision 
    – Cataracte (opacification du cristallin)
    – glaucome (hausse de la pression intra-oculaire)
    – dégénérescence maculaire (atrophie de l’épithélium pigmentaire rétinien)
    – rétinopathie diabétique (maladie des capillaires rétiniens)
    – Vertige positionnel
    – Névrite vestibulaire (vertige provoqué par un virus ou un médicament)
    – Maladie de Ménière (maladie de l’oreille interne)

    5. Troubles métaboliques et encodriniens 
    – Anémie
    – Hypoxie
    – Malnutrition (notamment, carence en protéine)
    – Deshydratation
    – Troubles ioniques
    – Hypoglycémie
    – Dysthyroϊdie

    6. Médicaments 
    Les personnes âgées consomment beaucoup de médicaments présentant de nombreux effets secondaires susceptibles de fragiliser la marche et l’équilibre. En voici une liste résumée dans ce tableau :

    MédicamentsEffets secondaires possibles
    Antihypertenseurs (diurétiques, inhibiteurs de l’enzyme de conversion, alphabloquants, spironolactone), antipsychotiques,antidépresseurs tricycliques de type IMAO, lévodopa, antiarythmiques, digitaliquesHypotension orthostatique
    Arythmie
    Troubles de la conduction
    Insuline, sulfamides hypoglycémiants (antidiabétiques)Hypoglycémie
    Hypervitaminose D, thiazidiques diurétiquesHypercalcémie
    Statines, corticostéroϊdesMyopathie
    Anticoagulants (aspirine)Anémie
    Benzodiazépines, anti-épileptiques, antipsychotiquesTroubles de la vigilance
    Antiparkinsoniens, antidépresseurs de type IMAO, lithium, anticholinergiques (Akineton)Confusion
    Anti-épileptiques (carbamazépines), antibiotiques de la classe des aminosidesVertiges
    L-Dopa (effet à long terme) neuroleptiques, antihistaminiquesTroubles moteurs de type parkinsonien (dyskinésie)
    Anti-épileptiques (phénytoïne, carbamazepine)Troubles de la vue

    7. Facteurs environnementaux 
    Les personnes âgées vivant à domicile font face à des dangers environnementaux responsables de 40% des chutes. Ces dangers – évitables – sont énumérés ci-dessous :
    – Chaussures et vêtements inadaptés (talons hauts, semelles glissantes, vêtements trop longs)
    – Fauteuil, lit trop haut ou trop bas
    – Pièces désordonnées ou encombrées de meubles
    – Tapis ou fils électrique mal fixés
    – Revêtement de sol irrégulier ou décollé
    – Éclairage insuffisant
    – Escalier dangereux
    – Sol humide ou glissant
    – Salle de bain inadaptée (baignoire glissante)

    A lire aussi

    Diagnostic des chutes des personnes âgées

    Après avoir évalué la gravité de la chute, le médecin aborde avec le patient – ou un éventuel témoin de la chute – les points suivants:
    – les circonstances de la chute : l’environnement dans lequel évolue le patient; un changement de position, une activité physique ou un repas ont-ils précédé la chute ?..).
    – Les symptômes associés (vertiges, faiblesse musculaire, confusion, troubles moteurs et visuels, etc.).
    – Il y a-t-il perte de connaissance (si oui combien de temps) ?
    – Les antécédents du patient sont bien entendu des indices à prendre en compte : antécédents d’accident vasculaire cérébral, maladie de Parkinson, maladie cardiovasculaire, troubles visuels, médicaments consommés, les éventuelles chutes précédentes.

    Examens cliniques

    Le médecin recherche des signes de maladie cardiovasculaire, neurologique, motrice, métabolique, ou sensorielle:
    – Prise du pouls.
    – Mesure de la pression sanguine en position couchée, puis debout 1,2, et 3 minutes après le lever (hypotension orthostatique?).
    – Prise de la température (fièvre, hypothermie?).
    – Auscultation cardiaque (arythmie, valvulopathie?).
    – Examen sensoriel de la tête et du cou (troubles visuels et auditifs?).
    – Évaluation du tonus et de la force musculaire, des réflexes.
    – Examen des articulations (signe d’arthrose, déformations des pieds etc.?).
    – Évaluation des fonctions mentales (confusion, troubles cognitifs?).
    – Évaluation de la proprioception (c’est-à-dire la capacité de l’individu à évaluer la position relative des parties de son corps les unes par rapport aux autres et dans l’espace) par le test de Romberg.
    – Évaluation de la démarche (observation du patient lorsque celui-ci se lève d’une chaise et se rassoit, lorsqu’il tourne sur lui-même, la hauteur de son pas, sa vélocité et sa symétrie).

    Examens para-cliniques

    Des examens paracliniques sont effectués en fonction des résultats de l’examen clinique et de l’anamnèse. Ils comprennent :
    – un électrocardiogramme (ECG) permettant de déceler d’éventuels troubles du rythme ou de la conduction.
    – Des tests sanguins (dosage de la créatinine, des électrolytes, du glucose et des différents composants du sang).
    – Échographie cardiaque.
    – Holter-ECG (si soupçon d’arythmie transitoire ou en cas de syncope inexpliquée) – Électroencéphalogramme.
    – Imagerie par résonance magnétique ou tomographie (pour exclure ou non une cause d’origine neurologique grave).

    Conséquences des chutes

    Les chutes des personnes âgées sont plus graves que chez l’adulte pour différentes raisons : réflexes moins rapides et moins efficaces, plus grande fragilité des os et des muscles… Les chutes conduisent dans 5% des cas à des blessures sérieuses (fractures, luxations, hématomes, etc.) ou une hospitalisation. Le quart des personnes hospitalisées pour chutes décèdent dans l’année.

    Certaines complications sont parfois difficiles à évaluer, notamment celles survenant après un léger traumatisme crânien, indécelable lors d’une radiographie cérébrale standard.

    Elles nécessitent l’aide de techniques plus précises telles que la scintigraphie osseuse ou l’imagerie par résonance magnétique. Une prise de sang est nécessaire si la personne est restée immobile sur le sol plusieurs heures (risque de lésions musculaires et d’insuffisance rénale provoquées par une augmentation d’une enzyme musculaire appelée créatine-phosphokinase).

    Ces complications peuvent s’accompagner de troubles neurologiques – en particulier un état confusionnel – plusieurs semaines après une chute. L’interrogatoire de l’entourage et un scanner confirmeront cette hypothèse.
    Une répétition des chutes peut entraîner le placement en maison médicalisée des aînés jusque-là autonomes.

    Les chutes ont également des conséquences sur le plan psychique : cela s’appelle le syndrome post-chute. En effet, un certain nombre craignent de récidiver, entraînant :
    – une baisse de l’activité physique (la personne s’impose des restrictions fonctionnelles).
    – Un isolement social
    – Une perte de confiance et d’estime de soi
    – Des troubles dépressifs et/ou anxieux
    – Une exacerbation de troubles névrotiques

    Ce syndrome peut apparaître plusieurs semaines après la chute.

    Evaluation de la marche et de l’équilibre

    Pour évaluer le risque de chutes des personnes âgées, les professionnels de santé ont recours au test d’évaluation de la marche et de l’équilibre au test d’évaluation de risque de chute.

    Prévention

    Après avoir géré les conséquences immédiates de la chute, le médecin propose au patient un programme individualisé afin d’empêcher toute récidive. Ce programme offre plusieurs approches : médicale, comportementale, rééducative, etc. Il vise à minimiser les facteurs de risque auxquels est exposé le sujet à risques.

    Par exemple:

    • Recommander des suppléments de vitamine D.
    • Arrêter, changer ou réduire les doses de médicaments qui pourraient augmenter le risque de chutes.
    • Dresser la liste de médicaments qui pourraient interagir entre eux et provoquer des effets secondaires:  somnolent, hypotension etc.
    • Faire vérifier sa vue au moins une fois par an.
    • Participez à des programmes d’activé pour renforcer sa musculature et son améliorer son équilibre (ex. Tai-chi)
    • Supprimer les obstacles dans sa maison (ex. tapis glissant)
    • Portez des chaussettes bien ajustées.
    • Faire appel à un kinésithérapeute.

    La maison doit être également réaménagée de la manière suivante :

    • Enlever les meubles et objets encombrants pouvant obstruer le passage.
    • Améliorer l’éclairage, en particulier la nuit si la personne doit se lever (vielleuses de la chambre à la salle de bain).
    • Éviter les tapis ou bien les fixer afin de ne pas se prendre les pieds dedans.
    • Enlever les fils électriques, rallonges qui gènent le passage.
    • Placer des tapis antidérapants et des barres d’appui dans la salle de bain si nécessaire.
    • Éviter de grimper sur une chaise ou sur un escabeau.

    Chutes : attention aux antihypertenseurs

    L’augmentation des chutes est associée à la prise de médicaments antihypertenseurs, entraînant plus de fractures de la hanche ou de traumatismes crâniens.

    Selon les chercheurs de l’université de Yale, ceux qui avaient plus de 70 ans et qui prenaient des médicaments avaient jusqu’à 40% de risque d’être blessés.

    Les effets secondaires des médicaments qui abaissent la pression sanguine (appelés les antihypertenseurs) incluent le vertige et les problèmes d’équilibre.

    «Etant donné le risque élevé de maladie et de mortalité associées aux chutes sévères, il est nécessaire d’évaluer le rapport risque/bénéfice avant de décider de traiter un patient souffrant d’hypertension», déclare Dr. Mary Tinetti, professeur à Yale.

    Selon un spécialiste, il n’existe pas de classes d’antihypertenseurs plus sûrs que d’autres. «Lorsque l’on traite un patient avec un antihypertenseur, on doit utiliser la dose la plus faible possible ».

    Un autre chercheur ne semble pas convaincu par les résultats et déclare qu’«il n’est pas exclu que les chutes soient provoquées par l’hypertension et non par son traitement ».

    Pour en arriver à ces résultats, les chercheurs ont rassemblé les données de 5000 septuagénaires.

    Durant les 3 années de suivi, 9% ont été victimes d’une chute et un tiers environ prenaient un anti-hypertenseur. 

    Source: JAMA Internal Medicine, février 2014.

    A lire aussi